À partir du 1er octobre 2025, un nouvel outil d’affichage fera son apparition dans le secteur de la mode en France : l’éco-score textile. Conçu pour évaluer l’impact environnemental des vêtements, ce système d’étiquetage s’inspire du Nutri-Score, bien connu dans l’alimentation.
Avec cet affichage volontaire, les consommateurs pourront mieux comprendre l’empreinte écologique de leurs achats vestimentaires. Un vrai tournant pour la mode neuve… et peut-être bientôt pour la seconde main.
Un affichage environnemental attendu depuis plusieurs années
L’éco-score textile s’inscrit dans la suite de la loi Climat et Résilience, adoptée en 2021, qui prévoyait de renforcer l’information du public sur l’impact des produits de consommation. Après des expérimentations sur plusieurs secteurs, c’est au tour du textile d’adopter ce principe.
Concrètement, les marques qui le souhaitent pourront afficher, à partir d’octobre 2025, un score environnemental de A à E sur leurs produits. Le calcul repose sur une méthode développée par l’ADEME, via l’outil public Écobalyse.
Ce score prend en compte :
Les émissions de gaz à effet de serre,
La consommation d’eau,
La pollution chimique,
Les effets sur la biodiversité,
La durabilité du produit,
Et le potentiel de relargage de microfibres plastiques.
C’est une approche dite « multicritères », fondée sur l’analyse du cycle de vie du vêtement, de sa fabrication à sa fin de vie.
Un dispositif volontaire, mais structurant
L’éco-score textile est volontaire, du moins dans un premier temps. Les marques peuvent choisir de le mettre en place ou non, mais celles qui y auront recours devront respecter un cadre strict et transparent.
Un site dédié (ecobalyse.ademe.fr) propose déjà une base de données publique et les outils de calcul associés. Les informations environnementales affichées devront être vérifiables et comparables. Pour garantir la fiabilité, un audit pourra être exigé.
Ce système crée une dynamique de marché : les marques les plus vertueuses auront intérêt à afficher leur score, tandis que celles moins engagées pourraient être poussées à améliorer leurs pratiques sous la pression des consommateurs.
Comme le résume le Ministère de la Transition écologique :
« L’éco-score textile doit permettre d’accompagner les acteurs dans leur transformation écologique et d’aiguiller les consommateurs vers des choix plus responsables. »
Quels effets sur la mode neuve en France ?
L’entrée en vigueur de l’éco-score intervient à un moment charnière pour le secteur. Face à la pression réglementaire et sociétale, les enseignes doivent repenser leur modèle.
L’éco-score textile agit comme un levier de transformation pour les marques :
Il incite à l’éco-conception : choix de matières moins polluantes, réduction des transports, amélioration de la durabilité.
Il valorise les efforts de transparence : traçabilité, certifications, production locale.
Il crée un nouveau critère de comparaison pour les consommateurs, au-delà du prix ou du style.
Certaines marques ont déjà anticipé ce tournant. D’autres devront s’adapter rapidement pour ne pas se retrouver à la traîne. Ce nouvel affichage pourrait devenir un avantage concurrentiel majeur.
Parmi les plateformes positionnées sur la mode durable, Paradigme incarne cette volonté de qualité et de traçabilité. Cette marque circulaire française mise sur la transparence pour séduire une clientèle en quête de sens.
Une absence remarquée : la seconde main, pour l’instant exclue
Aujourd’hui, l’éco-score textile ne s’applique pas aux vêtements d’occasion. Le dispositif ne concerne que les produits neufs, vendus à compter du 1er octobre 2025.
Ce choix interroge. En effet, la seconde main est déjà reconnue comme l’un des leviers les plus efficaces pour réduire l’impact du textile. Allonger la durée de vie d’un vêtement est souvent plus vertueux que d’en produire un nouveau, même éco-conçu.
Pourquoi ne pas intégrer ce segment ? Officiellement, la complexité de traçabilité des produits de seconde main, leur diversité d’origine et l’absence de données précises rendent l’analyse difficile. Mais cette exclusion pourrait être temporaire.
Des acteurs comme Vestiaire Collective ou Carbonfact travaillent déjà sur des méthodologies pour intégrer la seconde main dans l’évaluation d’impact. À terme, on peut imaginer que les grandes plateformes puissent proposer un score environnemental indicatif, basé sur la nature du produit, son âge, sa durabilité…
Cela offrirait un outil de comparaison supplémentaire aux consommateurs et valoriserait encore davantage les achats circulaires.
Dans notre article « Seconde main : la nouvelle norme du shopping responsable », nous analysions déjà cette tendance de fond : les acheteurs veulent du sens, pas seulement des prix bas.
Un outil pédagogique, mais des limites à surmonter
L’éco-score textile a pour vocation d’éduquer le public. Il s’inscrit dans une volonté de démocratiser l’information environnementale, avec un visuel simple et accessible.
Mais il soulève aussi plusieurs défis :
Sa lisibilité : tous les consommateurs comprendront-ils la méthodologie derrière la lettre A ou E ?
Son exploitation : certaines marques pourraient être tentées de verdir artificiellement leur score.
Son utilisation à grande échelle : petites marques ou créateurs auront-ils les moyens de produire des données fiables ?
Autre enjeu : la perception du public. Une notation négative sur un vêtement populaire pourrait générer de la méfiance… ou au contraire inciter à choisir autrement. La pédagogie sera clé, notamment pour éviter les effets pervers.
Cette transition s’inscrit dans un mouvement plus large de régulation de la fast fashion. La France a récemment adopté une loi imposant un malus environnemental sur les vêtements les plus polluants, comme nous l’expliquons dans notre article sur la loi anti fast fashion.
Ce que les plateformes peuvent anticiper dès maintenant
Même si la seconde main n’est pas encore incluse, les plateformes spécialisées ont tout intérêt à se saisir du sujet dès aujourd’hui.
Pourquoi ?
Pour répondre à l’attente croissante des utilisateurs en matière d’impact.
Pour se différencier par la qualité environnementale des produits proposés.
Pour créer des outils de filtre, de tri ou de valorisation des articles les plus durables.
Certaines peuvent aussi développer des indicateurs simplifiés basés sur l’ancienneté, la matière ou la réparabilité. Ce sont des pistes concrètes de différenciation, dans un secteur où l’offre ne cesse de croître.
un éco-score qui lance un débat bienvenu
L’éco-score textile ne résoudra pas à lui seul tous les problèmes environnementaux de la mode. Mais il représente une avancée majeure vers plus de transparence, de responsabilité et de pédagogie.
Il invite chaque acteur – marque, plateforme, consommateur – à se positionner clairement sur ses choix. Et même s’il reste perfectible, ce score pourrait bien devenir une référence dans le paysage de la mode responsable.
Chez Seconde Media, nous continuerons à suivre l’évolution de ce dispositif et à donner la parole à celles et ceux qui veulent transformer la mode, dans le neuf comme dans la seconde main.